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8 décembre 2015 2 08 /12 /décembre /2015 10:40
Je viens de recevoir d’Etelca Ridolfo, présidente de l’Ecomuseo delle Acque di Gemona (Frioul, Italie) l’annonce d’une rencontre, le 19 décembre, à Gemona, du réseau des producteurs italiens de maïs appartenant à des variétés anciennes et naturellement en risque de disparaître à la suite de la domination des producteurs industriels de semences standard, comme Monsanto. Jusqu’ici la législation européenne interdisait de commercialiser ces semences "non autorisées", assurant ainsi leur disparition à court ou moyen terme. Une loi italienne du 19 novembre dernier sur la bio-diversité (https://www.politicheagricole.it/flex/cm/pages/ServeBLOB.php/L/IT/IDPagina/9458) rend maintenant possible les échanges commerciaux de semences traditionnelles. "C’est une révolution !" dit Etelca. "A Gemona, nous chercherons comment entrer sur le marché sans se laisser prendre dans les mailles du filet des grands semenciers. Nous mettrons à profit l’expérience du Pan di Sorc pour créer de nouvelles opportunités économiques pour nos petits producteurs".
L’écomusée de Gemona est en effet tout à fait légitime pour s’occuper de cette question, avec son partenaire habituel, la grande organisation Slow Food, dont le siège est à Turin mais qui est représentée dans toutes les régions d’Italie. Le programme Pan di Sorc (un pain de maïs traditionnel) (http://www.pandisorc.it) a montré comment un écomusée pouvait réussir, sur son propre territoire et avec ses propres moyens, à créer une véritable filière agricole, artisanale et commerciale viable, qui part d’un maïs de montagne, le cinquantino, développé selon les normes biologiques par de petits agriculteurs, passe par le maintien en activité de moulins et de familles de meuniers, puis par l’engagement de boulangers artisanaux qui produisent de façon traditionnelle le pan di sorc et d’autres aliments à base de ce maïs (comme une polenta spéciale) et enfin par la promotion et la commercialisation locales et régionales.
Il existe bien d’autres exemples de l’efficacité des écomusées pour la sauvegarde d’espèces agricoles et de races animales menacées de disparition, dans des conditions que je qualifie "de filière", c’est à dire qui ne se contentent pas de protéger un élément parce qu’il est traditionnel, mais qui lui rendent une signification économique et le font contribuer au développement du territoire. Seulement pour donner quelques exemples que je connais personnellement (mais chacun pourra ajouter ses propres témoignages), je citerai le verger conservatoire de l’écomusée du Perche (France), le sauvetage de la Pecora nera par l’écomusée de Vale Stura (Piémont, Italie), la renaissance de la poule "coucou" de Rennes par l’écomusée du Pays de Rennes (Bretagne, France). Certes, les mêmes efforts sont faits par d’autres structures, institutions publiques ou associations, mais l’écomusée est mieux armé pour réussir l’intégration économique de ces productions à forte valeur ajoutée écologique, culturelle et sociale. Il peut organiser et contrôler toute la filière, il assure la mobilisation et la participation de la population et des porteurs de la mémoire et des savoirs techniques et pratiques nécessaires, il garantit la qualité à toutes les étapes de la filière. Peut-être aussi sera-t-il à même d’aider à adapter localement ces espèces et ces productions aux conséquences des changements climatiques, aux nouvelles formes d’énergie et aux difficultés croissantes de la ressource en eau.
Bonne chance à la réunion de Gemona, bon courage aux petits agriculteurs italiens qui vont montrer leur volonté de défendre une agriculture différente, à la fois ancienne et moderne.
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