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9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 12:26

Je trouve dans le Monde un article tout à fait troublant. Il s'agit de la momie particulièrement bien conservée d'une petite fille de 9 ans et demi, d'époque pré-colombienne, découvert en Colombie à une date imprécise, dans une grotte, sans autre renseignement, et qui se trouve dans les collections du Museum d'histoire naturelle de Toulouse. Le médecin légiste qui l'a examinée a été si bouleversé par cette expérience qu'il en a rendu compte dans cet article. Je reproduis ci-dessous la fin de son texte, qui me semble d'autant plus intéressant qu'il vient d'un non-spécialiste du patrimoine.

 

Extrait de "Réflexions anthropologiques...  au détour d'une rencontre", par le Dr Fabrice Dedouit, médecin légiste au service de médecine légale de l'hopital de Rangueil à Toulouse et chercheur à l'Université Paul Sabatier. Le Monde, supplément Sciences et médecine, 9 octobre 2013.

"...Et maintenant, que faut-il faire ? Faut-il la rendre à la Colombie? Ce pays a-t-il maintenant les ressources humaines, financières et techniques pour permettre de conserver au mieux cette enfant qui a quitté son pays depuis si longtemps ? Personnellement, je pense que cette question, qui rejoint l'éthique de l'archéologie et des fouilles, est primordiale. Si elle l'est pour les éléments inertes que sont les objets décoratifs, les tableaux, les parements, les parures, les bijoux... elle l'est encore plus, me semble-t-il, pour des restes humains.
Le fait que cette enfant ait respiré, parlé, ri, pensé, appris, joué me donne encore plus l'impression qu'elle a droit au respect. Il est clair que la préservation exceptionnelle de son intégrité physique si troublante est à l'origine de ces questionnements. Dans tous les cas, cette question pose débat au sein de la communauté scientifique, et, bien au-delà, au sein de la communauté politique.
Cette communauté politique n'est pas celle d'un pays isolé, mais celle de tous les pays qui ont, à un moment de leur histoire, été colonisés par des individus souvent convaincus d'avoir tout compris ou presque, et dont certains ont dépouillé des civilisations entières. Ces pays prennent conscience de l'hémorragie dont ils ont été victimes à une époque plus ou moins lointaine. Beaucoup sont maintenant aptes à retrouver ces fragments d'histoire et de culture perdus pour eux-mêmes, mais la plupart du temps pas pour le grand public, qui aura pu entre temps admirer les pièces et les individus dans les grands musées, pour la plupart occidentaux.
Ce problème est réellement complexe. Personne n'a la ou les bonnes réponses. Le plus important à mon sens étant déjà, avant d'aller plus loin, de poser les bonnes questions..."

 

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