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14 janvier 2018 7 14 /01 /janvier /2018 15:15

Bonne année à tous les visiteurs de ce blog, et même à ceux qui ne le visitent pas ? Mais "bonne année" qu'est-ce que ça veut dire ? C'est plus facile de raconter l'année passée que de se préparer à ce qui va nous arriver dans l'année qui commence. Essayons quand même de regarder quelques sujets qui peuvent rester d'actualité, dans la ligne de ce qui nous a intéressés ces années précédentes.

  • La déclaration du président français à Ouagadougou, annonçant une volonté de rendre aux musées africains, temporairement ou définitivement,  les objets ou documents qui ont été enlevés, au titre de butin de guerre, par les français lors de la colonisation, a relancé, non seulement en Afrique mais dans de nombreux pays de tous les continents, l'espoir d'une "repatriation", malgré tous les obstacles mis par les lois nationales et les discours culturels: collections des populations autochtones d'Amérique du Nord ou du Sud, produits de fouilles clandestines, de trafics et de guerres civiles ou non, pris en Asie ou même en Europe, œuvres circulant sur le marché international de l'art et des antiquités. Et ce n'est pas seulement la France qui est montrée du doigt! il est temps de passer du XIXe siècle au XXIe. Tous les peuples ont droit à leur patrimoine et les amateurs peuvent aller le visiter sur place. D'autant plus que nous ne sommes pas les mieux placés pour les interpréter et les respecter.
  • Les migrations, qu'elles soient politiques, économiques ou climatiques, qu'elles affectent les pays immédiatement voisins ou les pays riches d'Europe et d'Amérique du Nord, ne vont pas cesser par miracle et il n'y a probablement pas de moyen de les empêcher ou d'en réduire l'impact sur les migrants eux-mêmes ou sur ceux qui les reçoivent. Au delà de l'accueil recommandé par le Pape François et effectivement proposé par un nombre croissant de personnes, de familles et d'associations, demandons-nous ce que nous pouvons faire pour les aider à connaître nos cultures et nos patrimoines, en commençant pas nous intéresser nous-mêmes à connaître leurs cultures et leurs patrimoines. Nos musées, nos bibliothèques, nos programmes culturels peuvent-ils donner une place à ce que nous apportent ces gens: ce ne sont pas seulement des pauvres et des malheureux, ce sont aussi des porteurs de richesses et de valeurs, d'expériences, de savoirs.
  • Comment pouvons-nous plus et mieux profiter des échanges professionnels pour enrichir notre expérience ? Quand nous allons à l'étranger pour assister à des colloques ou pour suivre des cours dans une université, ou pour un stage, comment pouvons-nous profiter de l'occasion pour aller voir ailleurs, pour rencontrer des collègues, même inconnus, en dehors des programmes officiels qui nous sont proposés. Qu'est-ce que chacun d'entre nous peut proposer pour faciliter des contacts informels, pour faire connaître tel pays, telle région, telle ville dans ses dimensions sociale, économique, environnementale, et pas seulement culturelle. La même idée peut s'appliquer à nos vacances: on passe souvent à côté de choses très intéressantes, même professionnellement,, parce que personne ne nous a renseignés.
  • Comment pallier et compenser les effets pervers de notre monde connecté, de notre société "liquide" ? Il y a sans doute une nouvelle manière d'utiliser des formes anciennes de connaissance et de communication pour des objectifs nouveaux: plus d'attention et de diffusion pour l'écrit "durable" (le livre, le périodique), un regard nouveau sur la "chose réelle" comme antidote à l'image (même en 3D), au multimédia, à la réalité dite augmentée, à l'intelligence artificielle. Promenons-nous dans le patrimoine et dans le paysage sans appareil photo ou smartphone, seulement avec nos yeux bien ouverts.
  • Toutes les fois que nous faisons des choses intéressantes, que nous inventons des solutions à nos problèmes professionnels, pensons à en noter les processus, les succès et les échecs, les méthodes, les conséquences, pour nous enrichir nous-mêmes par l'auto-analyse de nos actions, mais aussi pour laisser une archive qui pourra servir à d'autres, aujourd’hui ou demain. Un simple journal de bord, en style télégraphique, peut suffire.

Bon, je ne sais pas ce que vous en pensez, mais je vais essayer de faire moi-même cette année un petit peu de tout cela, à mon échelle.

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12 décembre 2017 2 12 /12 /décembre /2017 12:24

Dans son discours de Ouagadougou le 28 novembre, Emmanuel Macron a parlé de l'absolue nécessité de rendre aux Africains les patrimoines qui leur ont été arrachés par les guerres de conquête, la colonisation et les trafics illicites en tout genre et qui se trouvent pour beaucoup dans les musées publics de France et d'autres pays européens..

Enfin, une autorité politique s'exprime clairement sur un sujet jusqu'ici tabou dans les milieux professionnels !!!

Emmanuel Macron parle, avec une certaine prudence, de "restitutions temporaires ou définitives". Il sait que, dans leur état actuel, les législations des musées dans la plupart des pays, à commencer par la France, établissent le principe absolu de l'inaliénabilité des collections publiques. Les responsables des musées et les professionnels qui y travaillent sont allergiques à toute suggestion de restitution, même lorsque les biens culturels concernés sont clairement d'origine illicite ou que leur détention est contraire aux principes humanitaires les plus généralement admis. On l'a vu lors de la restitution d'une tête Maorie par le Musée de Rouen, qui fit l'objet d'un procès au Maire de la ville pour atteinte à l'inaliénabilité (2007) et donna lieu finalement à une loi spéciale. François Mitterrand avait eu du mal à faire accepter le retour en Corée d'un des manuscrits royaux volés par des français en 1887 (1993)

E. Macron n'a parlé que de l'Afrique. Ce continent a été entièrement colonisé par des pays européens.et les collections de grands musées de Paris, de Londres, de Bruxelles, de Berlin en particulier, sont composées d'objets provenant du butin de guerres, d'acquisitions plus ou moins forcées par des gouverneurs ou des explorateurs, à une époque où les colonies n'avaient pas de vrais musées nationaux dignes de ce nom.

Maintenant, les "conservateurs" des musées européens nous disent que c'est grâce à leurs musées que toutes ces collections africaines ont été sauvées et que la loi leur interdit de les "aliéner". Certes, ils n'ont pas le droit de les vendre, mais est-ce aliéner que rendre des biens aux propriétaires à qui on les a pris, lorsque ceux-ci les réclament pour les rendre aux légitimes héritiers de leurs créateurs ?

Bien sûr cela pose de très nombreux problèmes, en raison de la division de l'Afrique selon des frontières politiques découlant de la colonisation, qui ne sont pas ethniques, culturelles ou linguistiques, du petit nombre de musées modernes (en matière de conservation physique des objets par exemple), des risques découlant des guerres civiles, etc.

Mais je crois que, si l'on prend vraiment au sérieux la déclaration du président français et si elle est partagée par d'autres chefs d'Etats européens, des programmes peuvent être lancés, par exemple à l'initiative de l'Union européenne, dans trois directions principales:

- aider financièrement et techniquement les Etats africains à moderniser en dix ans un musée national par pays, en matière de conservation, de sécurité, de moyens de présentation des collections;

- prêter à court terme ou déposer à long terme dans ces musées des ensembles significatifs d'objets venant de leurs pays respectifs;

- créer, dans les musées européens possédant des collections africaines et aux frais de ces musées, des postes de conservateurs-muséologues africains, invités en tant que conseillers pour la gestion et l'interprétation des collections venant de leurs pays.

De telles dispositions permettraient de créer progressivement un contexte favorable à une coopération et collaboration entre responsables des collections européennes et des patrimoines africains, qui pourraient préparer des restitutions plus durables ou définitives, au moins des pièces les plus significatives du patrimoine historique de chaque pays d'Afrique.

Et les Européens iront voir ces merveilles dans leur pays d'origine, dont ils pourront par la même occasion apprécier la culture contemporaine.

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23 octobre 2017 1 23 /10 /octobre /2017 16:00

Les gens de musée, les professionnels du patrimoine, les fonctionnaires des ministères de la culture continuent à se poser sous diverses formes le problème à la mode: comment les musées et en général les institutions responsables du patrimoine doivent-ils s'adapter aux nouveaux enjeux, aux besoins et aux attentes des sociétés en transformation, à l'ère du numérique, etc.La presse et les médias ne cessent d'en parler. Des colloques abordent le problème sous divers angles, par exemple:

  • colloque de l'ICOFOM à Paris sur "Définir le musée du XXIe siècle" (9-11 juin 2017),
  • rencontre de l'ICOM à Lisbonne sur "Éducation et Accessibilité dans les musées et le patrimoine" (2-5 octobre 2017),
  • colloque à l'Université du Pays Basque à San Sebastian sur "Le patrimoine culturel dans les sociétés liquides : quels biens culturels conserver à l'heure actuelle ?" (19-20 octobre 2017),
  • rencontre de l'ICOM à Bologne sur le rôle des musées régionaux et locaux dans la construction d'une Europe des peuples (13-14 novembre 2017).

Déjà l'an dernier, la Conférence générale de l'ICOM à Milan réfléchissait au musée comme "paysage culturel" dans un effort de modernisation du concept. Toujours en 2016, le Ministère français de la Culture faisait travailler une commission d'experts sur le musée du XXIe siècle.

J'ai personnellement été associé ces dernières années à diverses réunions formelles ou informelles - en France, au Portugal, en Italie notamment - sur l'avenir des musées face à des politiques nationales et locales aux budgets de plus en plus limités et donc de plus en plus exigeantes en matière d'utilité sociale. J'ai écrit avec Graça Filipe un long texte sur les risques et les tendances que vont rencontrer les petits musées locaux dans les années qui viennent ("Quel avenir pour les écomusées?" publié en français sur mon site www.hugues-devarine.eu).

Et je suis très loin de savoir tout ce qui se passe dans tous les pays et dans toutes les organisations professionnelles de musées  Mais il me semble qu'il n'est pas inutile de réfléchir à quelques questions préliminaires qui permettraient de clarifier le débat, par exemple:

 

De quels musées parlons-nous ? Je crois que la référence implicite est le musée d'art possédant des collections prestigieuses et situé dans une grande ville dont il constitue une attraction touristique et culturelle majeure. Cette référence est-elle utile pour les 99% de musées moyens et petits qui ne sont guère visités ?

On veut rendre les musées accessibles à tous, en pensant surtout aux publics "empêchés", c'est à dire tous ceux qui ne viennent pas au musée et en particulier les visiteurs âgés ou souffrant de handicaps. Mais se pose-t-on la question de savoir si ce que proposent les musées est accessible, c'est-à-dire simplement compréhensible pour l'immense majorité des populations locales qui n'en possèdent ni le langage ni les codes ?

La génération des 20-40 ans (les millennials ?) qui prend et prendra de plus en plus les pouvoirs politiques et économiques, qui crée et créera les modèles de comportement, les choix culturels de demain, cette génération est-elle et sera-t-elle encore intéressée par les musées-institutions et par les musées-collections, puisqu'elle peut déjà et pourra de plus en plus les voir en 3D et en "réalité augmentée" (sic) sur smartphone ou tablette, à supposer qu'elle en ait encore envie ?

Est-il normal de convoquer pour cette réflexion seulement des gens de musée et leurs alliés universitaires ou critiques, qui utilisent des statistiques de publics (c'est-à-dire de visiteurs), et qui partent du principe que le musée est utile, voire nécessaire, que la collection est son cœur et la conservation son objectif ultime, puisqu'ils en sont convaincus et qu'il savent ce qui est bon pour le peuple ?

Le patrimoine, dans une société "liquide", ne serait-il pas surtout tout ce qui vit autour de nous, qui se transforme, dont la valeur d'usage n'est pas nécessairement une valeur monétaire, et qui fait le plaisir de tous nos sens là où nous vivons, où nous travaillons, où nous voyageons, en plus de servir souvent à quelque chose de vraiment utile ? Faut-il l'acquérir et l'enfermer, le confier à des spécialistes, le réserver à des hordes de touristes et aux "happy few" ?

Alors, que faire des musées ? ne devrait-on pas les rattacher soit aux universités (pour la recherche et l'éducation), soit aux services publics chargés du tourisme (pour leur valeur d'image et d'attraction) ? ou bien oublier l'institution-musée pour réfléchir en termes de gestion collective du patrimoine commun ?

 

Mais qui suis-je pour oser aborder aussi légèrement et avec une telle impertinence des questions qui ont sans doute été déjà traitées par des esprits plus compétents qui leur ont peut-être même donné des réponses définitives ? Ça ne fait rien, les blogs c'est fait pour se défouler et pour mettre par écrit ce qui vous trotte dans la tête quand on n'a rien de mieux à faire, par exemple sur un lit d'hôpital.

 

 

 

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23 octobre 2017 1 23 /10 /octobre /2017 15:34

Je poursuis le travail de mise en forme et de mise à disposition de tous les intéressés des différents aspects de mon expérience professionnelle.

 

Un nouveau titre : Mon passage à l'ICOM – 1962-1974 - Collection Petites histoires vécues 4 – 160 pages

Cette fois, je rends compte des douze ans que j'ai passés au Conseil International des Musées (ICOM), comme assistant de Georges Henri Rivière puis comme directeur à partir de 1964, dont j'ai tenté de retirer le maximum de leçons. J'y passe en revue les grands dossiers que j'ai eu à traiter, les méthodes employées pour servir les musées du monde entier, les grandes figures du monde des musées que j'ai côtoyées et qui m'ont formé et inspiré. Il s'agit d'une période importante, qui suit immédiatement les décolonisations et voit la naissance de politiques du patrimoine et des musées dans les pays du Tiers Monde, mais aussi une explosion du nombre des musées, notamment locaux, dans les pays industrialisés.

 

Une réédition : Une politique de l'emploi au Ministère de la Culture – 1979-1982 - Collection Petites histoires vécues 1 - 192 pages

Ce petit livre était mal présenté et je le trouvais peu attrayant. Mais je le crois important pour présenter une politique nationale à un moment clé du changement en France : le début de la crise du chômage et l'arrivée au pouvoir de la Gauche en 1981. C'est un témoignage précis et documenté qui peut permettre de déchiffrer la complexité d'une politique publique. Ce cas particulier éclaire aussi quarante ans de mesures successives, générales ou sectorielles, de lutte contre le chômage. L'ouvrage est le résultat d'une commande du Comité d'histoire du Ministère de la Culture.

 

Je rappelle que le numéro 2 de la Collection Petites histoires vécues "Mes aventures à l'écomusée de la Communauté urbaine Le Creusot-Montceau 1971-2014" figure depuis longemps déjà sur le site.

Le numéro 3 de la collection devait être "L'écomusée, singulier et pluriel", mais il a été publié en 2017 aux Editions L'Harmattan que je remercie.

 

Il est possible que je poursuive cet inventaire de mes archives personnelles et de ma mémoire professionnelle, avec de petites histoires vécues à partir de mes expériences dans le développement local

 

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19 septembre 2017 2 19 /09 /septembre /2017 21:46

Dimanche dernier était la fête annuelle du patrimoine, dans toute l'Europe. Des millions de personnes se pressaient pour voir des musées gratuitement, ou pour visiter des monuments habituellement fermés. Est-ce une bonne chose? Cela renforce l'intérêt pour le passé, pour l'art, pour l'architecture, pour les grands monuments de notre histoire ou pour des sites industriels prestigieux. Est-ce une mauvaise chose?  Cela justifie que l'on stérilise une partie de notre héritage matériel et de notre environnement, sous le prétexte de le protéger, de le conserver. Malheureusement, ce débat n'aura pas lieu car il y a plus de consensus pour la conservation que pour le changement.

Mais le dimanche d'avant, le 10 septembre, le journal Le Monde publiait en page 28 deux opinions bien intéressantes que je voudrais rapprocher de cet évènement des Journées du Patrimoine. Le premier article, signé  de Mathieu Lefèvre et Brendan Cox, s’intitule "Pour intégrer les migrants, misons sur ce qui nous est commun". Il s'agit de reconnaître et de mettre en avant de qui nous est commun, à nous Européens et aussi ce que nous avons en commun avec ces populations qui arrivent chez nous et suscitent chez un nombre croissant de personnes (et d'électeurs) des réactions de rejet.

Le second article est intitulé "il faut un passeport culturel pour les immigrés". Il est signé par un collectif d'artistes et d'intellectuels et nous invite, du moins ceux d'entre  nous qui fréquentent musées et spectacles, à faciliter l'accès de tous ces arrivants à notre culture, afin de construire avec eux "une société commune".

On ne peut qu'être d'accord avec ces propositions et avec leurs motivations, mais il me semble qu'il manque un volet essentiel, ou plutôt la moitié du dispositif. Certes, le migrant a intérêt à s'adapter au plus vite à la société dans laquelle il va vivre plus ou moins longtemps et cette société a intérêt à faire le maximum pour l'y aider. De même, il est évident que ce ne sont pas seulement des mesures publiques qui peuvent y parvenir, mais bien la relation quotidienne entre les gens eux-mêmes, là où ils vivent. Il reste que ces gens qui viennent chez nous par nécessité, réfugiés  exilés, migrants économiques ou climatiques, n'arrivent pas avec leur seule "valise en carton", mais avec tout un bagage culturel, social, religieux,, patrimonial, qu'ils ne peuvent laisser à la frontière et qu'ils ne vont pas remplacer par ce qu'ils vont trouver là où ils vont s'installer. D'autre part, malgré toute notre bonne volonté, nous avons du mal à les comprendre, au delà même de la langue.

Alors ne faudrait-il pas, de notre côté, reconnaître l'existence, le sens et la valeur de ces "patrimoines" qu'ils apportent avec eux, leur demander de nous les présenter et de nous les expliquer, rechercher les points communs, mais aussi apprécier les différences: les valeurs que nous qualifions d’universelles le sont-elles pour eux aussi ? Il me semble que nos institutions culturelles, nos musées notamment, pourraient faire beaucoup plus pour apprendre aux français "de souche" les racines culturelles de ces nouveaux voisins, les vraies racines, pas seulement quelques chefs d’œuvre choisis par nos experts.  Et surtout chacun d'entre nous ne devrait-il pas s'intéresser réellement à la culture vivante et aux patrimoines, surtout immatériels, de ces gens ?

Autre chose: des millions d'européens voyagent chaque année en professionnels ou en touristes, dans ces mêmes pays d'où sont venus ou bien d'où viennent ces réfugiés et ces migrants.  Nous visitons leurs monuments et leurs musées, mais que retenons-nous de leurs cultures, de leurs valeurs, de leur organisation sociale, de leurs croyances ? Probablement peu de choses, sauf des photos et des impressions. Ne pourrions-nous pas profiter de leur présence chez nous pour apprendre d'eux ce qu'ils jugent important, ce qui leur permet de rester dignes et d'élever leurs enfants dans la fierté de leurs origines. Et, en prime, cela nous aiderait peut-être à mieux profiter de nos vacances.

 

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18 septembre 2017 1 18 /09 /septembre /2017 15:23

Je reçois d'Iñaki Arrieta <i.arrieta@ehu.es> l'invitation à contribuer au XIII Congreso - XIIIème Congrès annuel de l'Université du Pays Basque à San Sebastian sur le thème:

El patrimonio cultural en las sociedades líquidas:
qué bienes culturales conservar en la contemporaneidad
Le patrimoine culturel dans les sociétés liquides :
quels biens culturels conserver à l'heure actuelle ?


Universidad del País Vasco/Euskal Herriko Unibertsitatea - San Telmo Museoa
Donostia-San Sebastián (Gipuzkoa)

19-20 de Octubre - Urriaren 19-20an19-20 Octobre 2017

J'avoue que je n'avais jamais entendu parler de "sociétés liquides" et que j'ai dû rechercher sur internet des informations à ce sujet. Par contre la question "quels biens culturels conserver à l'heure actuelle" est très claire et me paraît d'une grande pertinence et d'une grande audace, à une époque où les institutions, les professionnels du patrimoine et les amoureux du passé voudraient tout conserver ou même restaurer dans un état "authentique". On aurait pu d’ailleurs formuler la question un peu différemment, par exemple: "quels biens culturels sont utiles, et donc méritent d'être conservés, dans une perspective de développement soutenable ?"

Mais peut-être n'est pas très "liquide"  !

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24 juillet 2017 1 24 /07 /juillet /2017 18:15

Je reviens d'une trop brève participation à la Summer School de l'Université de Brescia en Italie, sur le thème de l'accessibilité au patrimoine, musées et monuments.  L'organisateur, Prof. Alberto Arenghi, est directeur du laboratoire de recherche et d'enseignement sur l'accessibilité de cette université (Laboratorio Interdipartimentale *Brixia accessibility lab").  On est là dans l'application aux musés, aux monuments et aux sites du principe de l'Universal Design, qui devrait inspirer toute la gestion (management) du patrimoine et de l'offre culturelle qui lui est associée.

Pour plus d'informations: http://bral.unibs.it/summer-school.

Castello di Brescia

Ce fut pour moi l'occasion de réfléchir à cette approche  particulière de la gestion du patrimoine. Je devais intervenir sur le cas particulier du Castello de Brescia, la forteresse qui domine la ville en son centre, depuis l'époque romaine. Cela m'a permis de traiter de trois modes d'accessibilité de ce patrimoine pour les habitants de Brescia, considérés comme les propriétaires moraux et culturels et comme les usagers: privilégiés de ce site exceptionnel, qui est l'objet d'une nouvelle programmation globale par la Fondazione Brescia Musei. J'ai ainsi distingué:

- l'accessibilité culturelle, de façon à n'exclure personne de la conscience de l'importance du patrimoine que constitue le Castello et de l'intérêt des activités diverses qui auront lieu sur le site, quelque soit l'âge, le niveau d'éducation ou la culture d'origine;

- l'accessibilité sociale: par l'aménagement des calendriers et des horaires, les coûts d'accès au site et aux activités, la mise en sécurité des lieux et des parcours, les services offerts sur place, l'attractivité et la diversité des activités, une bonne efficacité de l'information;

- l'accessibilité physique: grâce à des transports publics aux horaires adaptés, à des accès piétons balisés et éclairés, à des aménagements spécifiques pour les personnes à mobilité réduite (handicapés, personnes âgées, familles avec enfants petits).

Alberto Arenghi m'a donné un livre collectif, publié par lui et deux collègues en 2016, qui constitue un panorama de la question de l'accessibilité sous toutes ses formes, et aussi, par la richesse bibliographique des diffétents chapitres,une revue critique de la littérature, surtout de langue anglaise et italienne, sur le sujet:

Accessibility as a key enabling knowledge for enhancement of cultural heritage, edited by Alberto Arenghi, Ilaria Garofalo, Oddbjorn Sormoen, Milano, Franco Angeli, 2016, 184p.

Je profite de cette occasion pour rappeler le IV Congresso Internacional Educação e Acessibilidade em Museus e Património - Formação para a Inclusão: A Acessibilidade Universal é exequível ? qui se tiendra à Lisbonne et Batalha du 2 au 4 octobre prochain. On peut en consulter le programme sur  https://eamp2017.wordpress.com.

 

 

 

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21 juillet 2017 5 21 /07 /juillet /2017 17:15
​ (Photo Hélène Prigent, Télégramme de Brest) ​

Il y a quelques années, une tempête détruisait des arbres centenaires de l'airial dans l'écomusée de Marquèze (Landes). Ces trois dernières années, la presse internationale s'est fait l'écho des destructions volontaires par Daech de monuments antiques en Irak et en Syrie. Il y a quelques jours, un individu a volontairement incendié la maison-témoin de l'écomusée de Ouessant (Bretagne occidentales).  Chaque fois, les émotions sont vives, car par définition le patrimoine est irremplaçable..

Mais je crois qu'il faut pousser la réflexion plus loin. Le monde où nous vivons est construit sur les ruines de ce que nos ancêtres ont construit. La presque totalité du passé à disparu sans retour pour laisser place au présent. Nous en connaissons une partie significative grâce aux descriptions, aux images, aux fouilles archéologiques. Et nous en sauvegardons une partie plus petite encore dans les musées et in situ par les politiques locales, nationales et mondiales du patrimoine.

Cette partie, même très minime, est soumise à de nombreux dangers: catastrophes naturelles, risques climatiques, guerres, vols et trafics. Les conventions internationales, les campagnes de mobilisation et de sensibilisation, les réglementations nationales, l'éthique professionnelle des agents culturels, tous les outils développés depuis cinquante ou cent ans ne pourront réussir qu'à limiter les dégâts.

Alors pourquoi ne pas nous référer au vieux principe de subsidiarité: faire gérer le patrimoine par ses premiers responsables, ses véritables propriétaires culturels, historiques et moraux, ses héritiers, les communautés locales elles-mêmes. Certes, cela ne fera pas renaître la vieille ville d'Alep ou repousser les arbres de Marquèze, mais chaque territoire sera conscient de son patrimoine vivant, le protégera ou le transformera, l'enrichira, lui maintiendra sa double nature matérielle et immatérielle, autant qu'il sera humainement possible, et en tout cas en conservera et en transmettra la mémoire.

Si je reprends le cas d'Ouessant, que je ne connais que par la presse et l'image, et notamment par les déclarations de ses responsables, il me semble que le vrai problème n'est pas la perte d'une maison (qui peut être reconstruite à l'identique) et de son mobilier, mais bien celui de la prise en mains du patrimoine vivant de l'île par la communauté des habitants. L'écomusée-institution est une propriété publique placée sous la responsabilité de professionnels et soumise à la réglementation nationale des musées. Ne peut-on saisir cette occasion pour inventer un moyen de mettre dans le coup les habitants, ou du moins le plus grand nombre possible d'entre eux, pour en faire les véritables gardiens, animateurs et gérants de tout le patrimoine non-muséalisé, naturel et culturel, du territoire où ils vivent ?

Il ne s'agit pas ici de donner des leçons, mais de suggérer un type de démarche qui a très bien réussi en Bretagne pour le développement économique, social et culturel local dans les années 60 à 80 du siècle dernier et qui fonctionne encore dans des endroits comme le Mené (Côtes d'Armor).. Une tradition d'initiatives communautaires, qui invente des solutions et crée des coopérations. Pourquoi ne pas l'appliquer au patrimoine, ce capital encore vivant, dont l'importance pour les gens dépasse de loin l'attractivité touristique et la signification purement scientifique ? Je connais des pays où cela marche aussi très bien, dans des communautés moins "administrées" et bien vivantes.

 

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2 juillet 2017 7 02 /07 /juillet /2017 16:26

"On a longtemps cru que le tourisme favorisait la compréhension interculturelle et la paix." Je trouve cette phrase en entête de http://www.unesco.org/new/fr/testing/africa-relaunch/resources/africa-department/news/tourism_and_culture_rethinking_the_mix/...

et cela au moment où je rédigeais un texte sur les premières années de la politique du tourisme culturel décidée par l'UNESCO dans les années 1960, plus exactement en 1964, alors qu'était lancée la Campagne internationale pour le sauvetage des Monuments de Nubie, les temples d'Abou Simbel, menacés par le projet de Barrage qui allait s'appeler le Barrage Nasser.

Ce texte fait partie d'un petit livre de sopuvenirs sur quelques grands chapitres de l'activité de l'ICOM pendant es années où j'en ai été le directeur. Ce livre va paraître incessamment sur mon site d'éditions www.hugues-devarine.eu.

Je me souviens très bien des discours qui étaient prononcés lors à la tribune de la Conférence générale de l'UNESCO, ou lors de la création de l'ONG ICOMOS, Conseil International des Monuments et des Sites. Le tourisme culturel allait permettre à la fois de sauver les plus grands monuments de ce que ce même UNESCO appellerait dix ans plus tard le Patrimoine de l'Humanité, et de promouvoir par l'échange culturel et le partage des richesses de ce patrimoine la compréhension entre les peuples.

Dans les années 60 du siècle dernier, on commençait à connaître la croissance rapide des flux touristiques, vers des pays et des sites qui, justement, se trouvaient être aussi riches en patrimoines monumentaux ou ethnographiques. Les classes moyennes des pays industrialisés avaient de plus en plus les moyens de voyager et en même temps une voracité de plus en plus grande pour l'exotisme et la consommation directe des cultures prestigieuses du passé. De plus, ces pays attrayants étaient pauvres, donc les séjours y étaient peu coûteux.

On sait ce qu'il est advenu de ce mouvement: le tourisme de masse a explosé, est devenu une industrie, indispensable pour les consommateurs des pays dits "émetteurs" avides de voyages et de vacances, et pour les pays dits "de destination", où le tourisme est toujours une source importante d'emplois et de devises, parfois même la première.

Depuis cinquante ans, des centaines de millions, sinon des milliards de touristes ont ainsi profité de loisirs dits "culturels", puisque consommateurs de patrimoines. Qu'en ont-ils retenu, à part des photos, des vidéos et des objets gardés en souvenir ?  Où en est la compréhension interculturelle ? Dans notre Europe riche et fière de sa culture et de ses valeurs, dont les habitants ont eu le privilège de visiter tant de pays et de villes, tant de musées, tant de monuments et de sites, comment se traduit cette compréhension entre les peuples annoncée par l'UNESCO il y a cinquante ans ?

En particulier, comment nos citoyens accueillent-ils les réfugiés et les migrants venus de ces mêmes pays visités il y a deux, quinze ou trente ans ?  qu'ont-ils appris de l'Islam et de ses coutumes ? Ont-ils vu les cultures vivantes des gens derrière les édifices prestigieux et ls paysages sublimes ? Comment expliquer que ce qui aurait dû être une expérience positive des autres et de leurs cultures se traduise en racisme quotidien, en protectionnisme, en demande de fermeture des frontières ?

Bien sûr, des Etats (la Suède, l'Allemagne, l'Italie au premier plan) font des efforts considérables d'accueil et d'intégration, bien sûr des ONG, des associations locales, des volontaires innombrables se dévouent ici et là-bas pour résoudre des urgences. Mais chaque campagne électorale, chaque incident ou attentat fait repartir un débat scandaleux, dans lequel la volonté de protéger notre petit confort de riches se cache derrière un discours de défense ethnique et culturelle.

Je suis heureux de constater qu'un nombre croissant de nos musées et institutions culturelles adoptent une position forte et réactive sur ces questions, pour le plus grand profit de leurs publics. Mais font-ils assez pour aller au devant des citoyens ordinaires, des "nouveaux habitants" qui sont souvent des immigrés, des futurs touristes avant leur départ, pour leur apporter des éléments de connaissance et de réflexion sur la diversité culturelle que nous rencontrons chez nous et ailleurs ? Et les musées des pays visités font-ils assez pour éduquer leurs visiteurs étrangers et les amener à apprécier les valeurs et les richesses de la culture vivante, au delà de la contemplation de choses du passé, si remarquables soient-elles ?

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25 juin 2017 7 25 /06 /juin /2017 16:28

L'ICOFOM, Comité international de l'ICOM pour la muséologie, présidé par François Mairesse, organisait, du 9 au 11 juin dernier, à la Sorbonne, à Paris, un colloque international intitulé "Définir le musée du XXIe siècle". Les participants à ce colloque purent bénéficier d'un ouvrage important contenant une documentation très complète sur les différentes définitions actuelles du musée ainsi que l'ensemble des contributions aux débats:

François Mairesse (coordination), Définir le musée du XXIe siècle - Matériaux pour une discussion, Paris, ICOFOM, 2017, 308p.

On peut se demander s'il est raisonnable de vouloir définir à nouveau le musée, surtout pour tous les musées, dans toutes les pays, toutes les cultures et toutes les langues. D'autant plus que le musée est une institution qui peut prendre des formes très différentes à l'intérieur d'un même pays, d'une même ville, d'une même discipline. C'est pourquoi j'ai peur des définitions, car elles ferment et excluent, surtout lorsqu'elles ont  une valeur normative.

Mais l'exercice est intéressant, précisément parce qu'il prouve clairement la fluidité d'un concept qui s'exprime très différemment selon qu'on le regarde d'un point de vue juridique (celui du législateur), professionnel (celui du muséologue, conservateur, curator) ou politique (celui du citoyen.

Je me pose plus particulièrement des questions à propos de deux approches qui font l'objet de points de vue et de commentaires dans ce recueil de textes et qui apparaissaient bien dans certaines des interventions que j'ai pu entendre (je n'ai participé que le premier jour):

 

1. L'entrée en lice du numérique et des technologies de l'information et de la communication (TIC) depuis la fin du XXe siècle a entraîné automatiquement une volonté, de la part des professionnels de musée, d'adapter leurs méthodes et leurs pratiques à ces nouveaux outils. Mais est-il encore nécessaire d'aller au musée et de voir les "choses réelles" qui composent collections, expositions et réserves ? Pourquoi faire la queue aux guichets, se plier aux horaires d'ouverture, cligner les yeux pour lire des cartels sommaires, si l'on peut jouir de toutes les richesses des musées dans son fauteuil et zoomer à loisir ? S'agit-il de la même démarche ? L'utilisation des TIC suffit-elle à faire sortir le musée de ses murs ? à rendre accessibles au plus grand nombre les choix et les commentaires faits par des spécialistes ?

 

2. Il semble bien que, même au XXIe siècle,tout musée doit être organisé autour d'une collection publique, permanente et inaliénable. Ce qui voudrait dire que toutes les formes de musée qui ne comprennent pas de collections répondant à ces trois caractéristiques doivent être exclues de l'appellation musée. Comme le disait Jean Chatelain, directeur des musées de France en 1972 à propos de ce qui allait devenir l'écomusée du Creusot-Montceau, "un musée sans collection n'est pas un musée". Mais alors que sont ces organismes qui font des inventaires participatifs du patrimoine vivant de leurs territoires, qui réalisent des cartes communautaires, qui constituent des collections dites écomuséales à partir du patrimoine commun des gens, qui présentent le patrimoine local au long de parcours balisés et commentés, et qui revendiquent quand même le nom de musée ?

 

Ne serait-il pas plus sage de dire qu'un musée est un projet de gestion patrimoniale parlant le langage des choses réelles au service de la société ? et laisser chaque responsable ou créateur de musée, public ou privé, inventer sa propre formule, ouverte ou fermée, participative ou non, généraliste ou spécialisée, en fonction du contexte local, des moyens disponibles et d'objectifs réfléchis ?

Quant aux collections scientifiques et aux trésors hérités du passé, ne pourrait-on leur donner des appellations et des statuts différents, plus fermés et plus protecteurs, répondant aux besoins des chercheurs et des amateurs éclairés ?

 

NB. Je ne parle évidemment pas ici des grands musées d'art qui doivent acquérir, conserver et présenter des oeuvres exceptionnelles appartenant au patrimoine de l'humanité et qui font partie intégrante du prestige et de l'économie touristique de leurs pays respectifs.

 

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